Article N° 8085
RÉSEAUX SICIAUX DÉSINFORMATION
Réseaux sociaux : quand la viralité prime sur la véracité !
Abderrahim Derraji - 21 avril 2025 06:57Le vendredi 18 avril, sur les ondes de France Inter, Yannick Neuder, ministre délégué chargé de la Santé, a annoncé la création prochaine d’un observatoire dédié à la lutte contre la désinformation en santé. Cette initiative française vise à répondre à une urgence de santé publique : la prolifération de fausses informations médicales sur les réseaux sociaux.
Aujourd’hui, l’accès à l’information n’est plus une difficulté. Le véritable défi est d’arriver à trier cette abondance de données, où le vrai se mélange au faux. Dans un contexte où les réseaux sociaux deviennent la principale source d’information pour une grande partie de la population, il devient primordial de structurer une riposte efficace.
Ce nouvel observatoire aura pour mission de recenser les fake news qui circulent en ligne, d’alerter les plateformes numériques et de saisir l’ARCOM (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) lorsqu’un contenu présente un danger avéré. L’objectif est clair : mettre en place un dispositif opérationnel de veille, d’alerte et de réaction rapide face à la désinformation médicale.
Comme l’a souligné Yannick Neuder, «il n’existe à ce jour, ni en France ni dans aucun autre pays d’Europe, d’organisation structurée pour contrer la désinformation médicale». Pourtant, la menace est bien réelle. Depuis la pandémie de COVID-19, les fausses informations en matière de santé ont proliféré, semant le doute, alimentant les peurs et contribuant à l’hésitation vaccinale, un phénomène dont les conséquences peuvent être tragiques.
Plusieurs pays ont tenté de riposter, chacun à sa manière. La France a adopté, dès 2018, une loi contre la manipulation de l’information, s’appliquant aussi au domaine médical.
L’Allemagne, de son côté, impose aux plateformes le retrait rapide des contenus illicites via la loi NetzDG, tout en soutenant activement les initiatives de fact-checking, comme celle du site Correctiv. Singapour va plus loin encore avec sa loi POFMA, qui autorise le gouvernement à exiger des corrections immédiates sur les fausses informations en ligne. Cette rigueur soulève certes des interrogations sur la liberté d’expression, mais elle a prouvé son efficacité lors des crises sanitaires.
Le Maroc, où les réseaux sociaux occupent de plus en plus une place centrale dans la diffusion de l'information, a également pris des mesures décisives. Pendant la pandémie, des campagnes de sensibilisation ont été menées à la télévision et sur les réseaux, en partenariat avec des professionnels de santé et des influenceurs. Le portail covidmaroc.ma a été lancé pour centraliser les informations fiables. Parallèlement, des poursuites judiciaires ont été engagées contre les auteurs de fausses informations susceptibles de troubler l’ordre public.
Mais ces mesures, bien qu’utiles, restent insuffisantes. Les fake news continuent de perturber les systèmes de santé et de fragiliser le lien de confiance entre les citoyens et les institutions médicales. L’exemple de la rougeole, responsable de plus de 120 décès, est édifiant : seule une mobilisation intense du ministère de la Santé et des professionnels a permis de convaincre des parents méfiants de reprendre les vaccinations interrompues.
À l’avenir, une stratégie durable devra d’abord reposer sur la mise en place d’un dispositif de vigilance permanent, capable d’identifier rapidement les signaux faibles de désinformation et de les transmettre à une structure dédiée, apte à prendre sans délai les décisions nécessaires. Ensuite, il conviendra de créer des labels pour les sites médicaux marocains, afin de garantir la
fiabilité des contenus diffusés. Enfin, il sera essentiel de promouvoir l’éducation à l’esprit critique, notamment chez les jeunes, pour leur permettre de distinguer une information fiable d’une rumeur toxique.
Par ailleurs, les professionnels de santé, les sociétés savantes et les institutions publiques doivent travailler de concert pour relever ce défi. Car il ne s’agit pas seulement de corriger des erreurs, mais bien de reconstruire une relation de confiance entre la science et le public. À l’heure où une rumeur peut causer plus de dégâts qu’un virus, la lutte contre la désinformation médicale n’est plus une option, mais une nécessité.
[1] lemoniteurdespharmacies.fr
Source : PharmaNEWS